Autocenter
Berlin sans L
_Alone.
Alone in Barcelone. Cette vieille rime me saute à l'oreille. Comme les bruits, les sons qui me viennent dans ce bar. Un peu comme une chanson. Avec des flots, des fonds. Comme la petite musique de ma vie, qui m'accompagne, sans cesse. Avec sa multitude de mots. comme des paroles qui se superposent, au brouhaha de la rue, par bribes ; ... "le monde des cultureux" / "certains qui pensent la structure" / "et qui comprennent les problématiques de chacun" / "qu'ils reconnaissent l'autre"... Avec en arrière-plan, la musique, la "vraie", celle qui diffuse, enveloppe, se répand, insensible aux conversations. J'écoute distraitement. Ca ressemble à du tango, revisité jazzy, "Gotanisé". Barcelone, Londres, Berlin, d'un bar à l'autre, souvent les mêmes bières, les mêmes musiques.
"Non non, je n'ai pas trop aimé les œuvres, mais j'ai trouvé que c'était vraiment bien fait, j'ai trouvé que c'était réussi"... Est-ce qu'il s'agissait de celles de cet après-midi à l'Autocenter ? Certainement pas de Salgado vu cet après-midi au C/O Center... Comment critiquer pingouins, baleines et autres photos-témoins d'une terre-mère en voie de disparition, même si elles gardent le même grain éclaté que celles des mineurs du Brésil, les mêmes gris-noirs argent qui allaient si bien à leur calvaire, marque de fabrique oblige...

 

[Une "cigarette machine" ? Ca existe ici.]

 

Dada FalafelSe déplacer, encore _Bouger. Errer un temps. Débarquer au Liban. Un faux air d'Istambul. Resto. Dada Falafel ; "un peu de tout" dans une grande assiette ovale, mais "without meat". Monter à l'étage, pousser les tables, admirer les lustres multicolores, attendre et souffler. Ecouter encore, se soustraire. "Près du mont blanc ... où la neige disparaît ... mer de glace gris sale, prendre un petit train" / "ne pas rater celui du Love". Quand il passe.
J'écoute encore. sans un mot. Sans que personne ne se soucie. Aujourd'hui quelqu'un qui tripote son portable en soirée se fond dans la masse. Echanges. polis, doucereux. Feutrés. C'est l'heure des questions ; "pourtant ça fonctionne / comment contourner le système ?". Puis des réponses ; "Créer des sortes de boites en carton, super classe... multicolores et chaudes" / "je goûte au bonheur de la solitude" / "ce qui nous manque le plus c'est la contemplation" / "Il n'y a pas d'interdit ?". Bien se regarder dans les yeux en trinquant et éviter ainsi "sept années de misère sexuelle".
Impossible d'éviter le crachouillis de musique techno, qui tente évasivement de revisiter des standards latino.

 

[La misère se niche partout, pas toujours où l'on pense.]

 

Shingo YoshidaJe devais absolument retrouver Shingo _Il est arrivé en vélo. Tout juste rentré du Japon. Crevé. Ca se voit. Tokyo coincé entre Sibérie et Slovénie.  Retrouvailles Lyonnaises et vernissage à la Berlinische Galerie. "Radically Modern". Après une bière on se promène dans les salles immenses. On se perd dans la foule. Peu de temps pour parler de lui, de son exposition en mai à La Conciergerie. On parle. On rit. A nouveau je zappe. L'écho et chaque phrase, chaque mot qui me surprennent, happés, aussitôt mixés m'entraînent, évanescent, dans un de ces déplacements si familiers. Assis, semi-mobile, visiblement ailleurs, solitaire et distant, je déambule avec L dans ces rues froides parce qu'inconnues, pourtant passantes, animées, joyeuses. Mais c'est pour d'autres, autres vies, autres histoires, autres solitudes aussi peut-être. Ne rien montrer. Attendre, bien calé sur son siège, bien dans sa case, pour que tout tourne, et tourne bien, rond, circulaire mais rectiligne, de A jusqu'à Z, lentement et sans détours. C'est le programme. Berlin restera étrange et distante pour moi. Je n'en suis pas revenu je crois. Je ne crois pas.

 

[J'ai toutes les photos]